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Motion sur la laïcité - CNESER du 18 mai

Le CNESER du 18 mai avait notamment à son ordre du jour le vote d’une motion sur la laïcité, à l’initiative de la Conférence des Présidents d’Université (CPU).

De nombreux membres du CNESER ont contribué à sa rédaction finale.

Deux autres motions avaient initialement été présentées par QSF et la FERC Sup qui les avaient finalement retirées.

La motion a donc été votée par 37 voix pour, 0 contre, 3 abstentions, 1 refus de vote.

Force Ouvrière, qui avait appelé à voter pour la motion, se félicite de ce résultat.

 

CNESER du 18 mai 2015 – Déclaration de Force Ouvrière sur la motion laïcité

Pour FO, la prise de position du CNESER sur la laïcité à l’Université revêt une grande importance.

Après les événements tragiques de janvier, et en réponse à la situation créée, on nous propose souvent de revenir sur ce qui constitue notre tradition républicaine.

FO est une organisation syndicale laïque et républicaine

En France, la République comporte un certain nombre de lois fondatrices. Les constitutionnalistes appellent d’ailleurs certaines d’entre elles les lois constitutionnelles.

Parmi ces lois :

-    il y a la loi de séparation des églises et de l’Etat de 1905.
-    Il y a la loi Waldeck-Rousseau du 21 mars 1884 qui autorise les syndicats à s’organiser librement pour défendre les droits des travailleurs. C’est sur cette loi que s’appuie la Charte d’Amiens de la CGT de 1906 qui définit l’indépendance du syndicalisme et qui constitue le préambule des statuts de la CGT-FO
-    Dans le domaine qui est le nôtre, il y a la première de ces grandes lois, la loi du 27 février 1880 qui rétablit le monopole de la collation des grades par l’Etat et qui édicte que « Les établissements libres d'enseignement supérieur ne pourront, en aucun cas, prendre le titre d'universités »

A sa suite de cette dernière, les lois de la République ont incorporé le respect et le maintien des garanties séculaires connues internationalement sous le titre de « libertés académiques », qui sont inscrites dans des articles du Code de l’éducation :

•    L141-6 : « Le service public de l'enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l'objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l'enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique ».
•    L811-1 : « Les usagers du service public de l'enseignement supérieur (...) disposent de la liberté d'information et d'expression à l'égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Ils exercent cette liberté à titre individuel et collectif, dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d'enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l'ordre public ».

Ces formulations, aujourd'hui dispersées dans le Code de l'Éducation, étaient anciennement constitutives respectivement des articles 35 et 36 du titre explicite « des franchises universitaires » de la loi du 12 novembre 1968.

Le choix des termes a une extrême importance. Ces articles sont emblématiques de la « tradition universitaire » où la « neutralité » exigée dans les enseignements primaire et secondaire, est remplacée par le « respect de la diversité des opinions ».

Les statuts de la Fonction Publique permettent également que tout citoyen étranger peut devenir chercheur ou enseignant-chercheur, donc fonctionnaire d’Etat, ce qui découle de la tradition de « pérégrination » entre Universités qui remonte au Moyen-Age.

Force Ouvrière, considère que la réponse à la grave situation que nous connaissons ne consiste pas à détricoter la République, mais à préserver ses fondements et à les développer.

Ce n’est pas en détricotant les statuts et le Code du Travail, comme le font la loi Macron et le Pacte de responsabilité, que l’on répond à la situation, mais en avançant vers la république sociale.

Ce n’est pas en délivrant moins de connaissances aux collégiens, et les plus défavorisés en seront les premières victimes, que l’on répond à la situation, et la grève du 19 mai contre la réforme du collège, est totalement justifiée, et nous avons appelé les universitaires à la soutenir.

Ce n’est pas en appliquant à l’université la règlementation de neutralité y compris vestimentaire, qui est celle appliquée aux enseignements primaire et secondaire, contre la liberté d’opinion, contre les libertés académiques et contre les franchises universitaires que l’on répond à la situation.

C’est au contraire en défendant l’Université laïque et républicaine que l’on répond à cette situation

Dans le domaine universitaire, il y eu, comme dans beaucoup de domaines, de grandes régressions, quels que soient les gouvernements. La liste en est longue et diverse. Ainsi :
-    Le processus de Bologne, avec toutes ses conséquences
-    La loi LRU1, puis la loi LRU2 qui avec les COMUE organise l’accueil d’établissement privés et confessionnels au sein d’établissements publics, comme à Lille et dans l’ouest à l’Université Bretagne Loire.
-    L’introduction de l’approche compétences dans les enseignements et maquettes de diplômes, contre la transmission des connaissances disciplinaires
-    Etc.

A ce sujet, nous tenons à affirmer notre accord avec le contenu de ce qui était la motion initiale de la FERC sup, qui détaille ces régressions, tout en nous félicitons que cette motion ait été transformée en déclaration liminaire, comme celle de QSF, ce qui permet qu’un seul texte soit soumis au vote du CNESER.

FO, avec d’autres, a combattu ce que nous appelons des contre-réformes et très souvent nous nous sommes opposés sur ces questions à la CPU.

Mais aujourd’hui, nous estimons que cette motion à l’initiative de la CPU, à laquelle de nombreux membres du CNESER ont contribué, constitue une motion en défense de l’Université laïque et républicaine, sur la base des principes des grandes lois de la République. Elle répond aux problèmes de l’heure. C’est pour cela que nous la voterons.

Motion laïque du CNESER

Le CNESER entend rappeler solennellement son attachement à la loi de 1905 et au respect du principe de laïcité dans les établissements d'enseignement et de recherche affirmé par le code de l'éducation. L'article L 141.6 du code de l'éducation dispose que « Le service public de l'enseignement supérieur et de la recherche est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou politique ; il tend à l'objectivité du savoir et respecte la diversité des opinions. I1 doit garantir à l'enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique ».

La loi de séparation des Eglises et de l'Etat de 1905 est une loi de tolérance et de liberté qui garantit la liberté de conscience et permet à tout citoyen l'expression de sa foi ou le droit de ne pas en avoir ; elle protège les affaires publiques de toute emprise des institutions religieuses et doit être inscrite dans une perspective historique et juridique large.

Le législateur interdit par ailleurs, dans l'enceinte scolaire, le port de tout signe religieux de quelque confession que ce soit ; le principe de neutralité s'impose à l'accueil d'enfants ou d'adolescents. Il ne vise délibérément pas l'Université qui depuis le Moyen Age accueille des adultes, universitaires, chercheurs et étudiants ou étudiantes de toutes origines ou opinions philosophiques, religieuses ou politiques. L'Université obéit aux lois de la République ; elle ne saurait être soumise aux mêmes règles que celles qui s'appliquent aux enseignements publics primaire et secondaire, sauf à déroger à ses propres franchises qui fondent son universalité.

D'après la jurisprudence (Conseil d'Etat et Cour européenne des Droits de l'Homme) et contrairement à l'ensemble des agents du service public, l'interdiction du port du voile ou tout autre signe religieux visible par des étudiant.e.s à l'Université n'a pas de base légale (à l'exception de cas concernant la sécurité ou l'hygiène). Y voir une menace contre l'institution universitaire relève d'une défiance à l'encontre des universitaires qui seraient jugés inaptes à former des esprits libres et à ouvrir de nouveaux champs de connaissances. C'est aussi mépriser les étudiantes et les étudiants en les tenant pour incapables d'exercer leur esprit critique et de prendre distance avec leurs croyances. Accueillant des étudiants de nombreux pays, l'université ne souhaite pas renoncer à toute ouverture internationale profondément ancrée dans la tradition universitaire.

La vraie menace est ailleurs. Elle réside dans le risque d'intrusion des religions et d'idéologies diverses dans la science, le contenu des enseignements ou des champs de recherche, au mépris de la liberté de chaque enseignant d'exprimer sa pensée et de la liberté des étudiantes et étudiants inscrits d'assister aux enseignements dispensés, et en violation des franchises universitaires.

C'est en permettant à tous les citoyens français comme aux ressortissants étrangers d'exercer, dans le respect de chacun, librement leur foi ou de ne pas en avoir, que l'Université pourra continuer d'œuvrer à la modernité de la société française et de promouvoir les valeurs humanistes à l'international.

Texte adopté à 37 voix, 3 abstentions, un refus de prendre part au vote